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5 décembre 2011 1 05 /12 /décembre /2011 18:33

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4 décembre 2011 7 04 /12 /décembre /2011 17:01

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3 décembre 2011 6 03 /12 /décembre /2011 22:11

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Je travaille sur plusieurs projets en ce moment. Ce qui explique mon silence...

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6 novembre 2011 7 06 /11 /novembre /2011 13:50

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Maudit Victor de Benoit Preteseille, éditions Cornelius.

 

 

Voici une fable énigmatique sur l'art et sur la monomanie. Après sa charge iconoclaste et Dadaïste contre l'idée de musée et d'oeuvre d'art (L'art et le sang), Benoit Preteseille questionne ici la question de l'obsession et d'une vision monoptique de l'art (le héros se crevant un oeil) où tout tourne autour des chevaux. Ce maudit Victor, peintre hanté par la figure du cheval semble être une sorte d'écho masculin à l'excentrique peintre animalière Rosa Bonheur (une artiste de la fin du 19ème, elle-même hantée par les animaux de nos campagnes, sujet central de sa peinture). Comment peut-on passer sa vie à peindre la même chose?

 

Cette bande dessinée nous plonge dans une ambiance 1800, avec un questionnement relevant plutôt de l'art contemporain : comment faire de son art une pratique orientée par une seule contrainte (on peut penser à Opalka, Viallat, Buren...). 

La malédiction de Victor, ne peindre que des chevaux, nous offre au passage une relecture cocasse de l'histoire de l'art (La mort de Sardanapale, l'enlèvement des Sabines version équine).

Sans vouloir trop révéler du contenu de l'histoire ou me lancer dans une interprétation capillo-tractée, il y a ici des questionnements récurrents à l'oeuvre de Benoit Preteseille : l'art est un animal sauvage difficile à dompter, l'artiste est un monstre, un marginal qui a un oeil lumineux et l'autre obscur. La création est une destruction, une mutilation, l'oeuvre est une blessure. Détruire c'est créer. On casse pour mieux reconstruire. Du laid au beau, du magistral au ridicule, tout se métamorphose.

 

Bref ça parle de l'étrangeté d'être de façon générale et d'être artiste en particulier. Et c'est joliment fait à travers une alternance entre des dessins sobres et des lavis délicats.

 

A lire, à offrir, c'est bientôt noêl, nom d'un petit cheval de bois!

 

201109-maudit-victor 6

 

 

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28 octobre 2011 5 28 /10 /octobre /2011 21:05

Quest-ce qu’un dessin ?

 

« Le dessin est la base de tout. » Alberto Giacometti

 

Qu’est-ce qu’un dessin ? Les questions les plus bêtes sont les meilleures. Comme celle des enfants, souvent désarmantes, qui revisitent nos évidences, questionnent nos croyances. Posons donc la question : qu’est-ce qu’un dessin? Qu’est le dessin ? Et qu’est-ce que dessiner ?

 

Parce que ce n’est pas forcément évident de trouver une bonne réponse. Même si la formule « je ne vais pas vous faire un dessin » ou « un dessin vaut mieux qu’un long discours » semble renvoyer à une lisibilité, une évidence de cette forme de communication, ce qui passe à travers elle est complexe.

Il y a d'abord cette proximité trahie par le langage entre dessin et dessein. Dessin provient du mot dessein. Avoir un dessein, une idée derrière la tête. De la pensée à formuler, des sensations à exprimer. Projeter, le dessin étant à la fois le projet et sa projection sur une surface. La séparation de ces deux termes semble privilégier une définition liée au résultat plus qu’à son origine. Pour bien comprendre le dessin il faut réunir ces deux aspects : mental et matériel, cause et conséquence. Le dessin est un iceberg qui comporte sa dimension cachée.

Dessiner c’est laisser une trace, déposer une information, aligner des signes, formuler une phrase muette. Mais qui dessine ? Pourquoi ? D’où partent ces flèches et vers quelle cible ? Le dessinateur est dans son dessin comme le projet est dans sa réalisation. Le dessin est l’indice de ce qui l’a provoqué, de qui l’a provoqué. Le dessin est un indice. Tout dessin est un sous-entendu.

 

Historiquement, le dessin à l’époque classique est là pour ébaucher, pour préparer une peinture ou une sculpture à venir. Le dessin est subordonné à quelque chose d’autre et ne jouit pas vraiment du statut de l’œuvre que l’on donne à une toile ou un marbre. Esquisses, brouillons, shémas, souvent laissés dans l’ombre des œuvres qui en seraient l’incarnation parachevée, améliorée, colorisée (le trait disparaissant sous les couches de peinture, comme un squelette, trop nu pour être exhibé pour lui-même).

Dans cette optique le dessin est plus un moyen qu’une fin. Il ne peut donc pas prétendre à être œuvre. Il ne peut être pris pour lui-même.

 

La modernité à fait évoluer notre regard sur le dessin. Il est devenu peu à peu objet d’intérêt, pour lui-même. Il n’y a qu’à voir le succès du dessin contemporain, les nombreuses expositions qui lui sont dédié, même s’il reste quelque part une sorte de complexe d’infériorité culturel face à d’autres formes plus sophistiquées ou plus spectaculaires (peinture, photo, cinéma). Le dessin ne devrait pas rougir de la simplicité de ses moyens. C’est justement là sa force. Je pense que le dessin est l’origine et le terme. C’est la manifestation la plus pure et la plus fondamentale de l’art. Aussi basique que le fait d’écrire, qui en lui-même contient le monde, Le dessin possède l’univers. Avec un simple crayon, un bout de charbon, une plume on peut convoquer toutes les formes sur une page. Le dessin est tout.

 

A partir de quand il y a dessin ? Brassaï est l’auteur d’une série de belles photographies en noir et blanc sur les graffitis grattés sur les murs de Paris : têtes de morts, crevasses, trous, griffures. Des témoignages d’anonymes aux échos primitifs, intemporels, gratuits, débarassés de l’idée d’art ou de beau, bruts. Je pense aussi à ses fameux doodles, graphismes fait à vide, au téléphone, dans un état second, d’absence de contrôle. Au-delà de la question du savoir-faire et de la ressemblance, tout est potentiellement graphique (c’est ce que l’oeil photographique de Brassaï met en évidence). Donc le dessin est là très tôt, parfois sans notre dessein. A condition de vouloir bien le voir. Un sentier dessiné par des vaches, un visage deviné dans la forme d’un nuage, la fumée laissée par les avions, la trajectoire d’un skieur…

Je pense que le dessinateur doit avoir cette ouverture d’esprit, cette attention aux détails qui fait qu’il n’y a pas de frontières fixes entre beau et laid, mal fait et bien fait, élitiste ou populaire, noble ou vulgaire. Le dessin commence avec les graffitis obscènes dans les toilettes, les piètinements dans la poussière alors qu’on attend son bus, la façon dont on aménage un intérieur. Tout est dessin. Tout pousse à dessiner, surligner, mettre en évidence.

Ce n’est pas un hasard si certains motifs pariétaux de la préhistoire s’inscrivaient dans la forme particulière d’une cavité, comme pour mieux trouver une évidence, souligner une coïncidence, une analogie. Comme si le monde était une grille de lecture, proposant des formes à décoder, des énigmes. Le monde étant à la fois le modèle, l’encre, la page et l’outil. Oui, tout peut être dessin.

La seule différence pour un dessinateur c’est qu’il en fait une pratique à part entière, qu’il répète, plus ou moins consciemment et qu’il donne à voir ce que les autres ne voient pas, il force le trait pour mieux montrer. Comme ces devins qui lisaient l’avenir dans les viscères. « L’art ne reproduit pas le visible, il rend visible », disait très justement Paul Klee.

Tout le monde peut dessiner, tout le monde dessine, même si tout le monde n’en fait pas son obssession.

 

J’en viens à un autre aspect : le dessin comme pathologie. Dans quelle

mesure dessiner ne relève pas d'un trouble obsessionnel compulsif? Sinon comment expliquer ces heures sur une image, et sa vie entière à dessiner. Car dessiner est comme une démangeaison : plus on gratte et plus ça démange et vice versa. Le dessin est une pratique ludique, j’ai envie de dire innée, spontanée chez les enfants. Les dessinateurs seraient donc des enfants qui ont continué là où les autres, par sérieux, ont passé à des activités plus nobles ou plus utiles.

Cette deuxième nature fait que tout tourne autour du dessin, tout nourrit le dessin. Même dans les moments d’inactions, un dessinateur pense au dessin.

Cet aspect obsessionnel, ce TOC, me fait penser au surnom d’Hokusai : « le fou de dessin ». Son témoignage donne des clés pour comprendre ce que peut signifier l’acte de dessiner :

 

"…Depuis l'âge de cinq ans, j'ai la manie de recopier la forme des choses et depuis près d'un demi siècle, j'expose beaucoup de dessins; cependant je n'ai rien peint de notable avant d'avoir soixante-dix ans. A soixante-treize ans, j'ai assimilé légèrement la forme des herbes et des arbres, la structure des oiseaux et d'autres animaux, insectes et poissons; par conséquent à quatre-vingt ans, j'espère que je me serai amélioré et à quatre-vingt-dix ans que j'aurai perçu l'essence même des choses, de telle sorte qu'à cent ans j'aurai atteint le divin mystère et qu'à cent dix ans, même un point ou une ligne seront vivants. Je prie pour que l'un de vous vive assez longtemps pour vérifier mes dires."

 

Dessiner est une quête. Un moyen de comprendre le monde et d’en saisir l’architecture ou l’ordre caché. Dessiner c’est chercher quelque chose et le dessin (en tant que pratique) est un outil d’investigation. La nature du but peut différer, plus ou moins métaphysique ou plus ou moins prosaïque mais il semble évident que dessiner c’est chercher à mieux y voir, déjà dans son propre dessin. A montrer ce qui ne se voit pas. Dresser la main, assouplir les nerfs et le poignet. Aiguiser le crayon et l’œil.

 

Ce que dit aussi Hokusai, et qui me semble éloquent : arriver à rendre vivant le moindre point, la moindre ligne. Tout le problème du dessin est là. Il faut rendre naturel quelque chose qui ne l’est pas. Faire que cet artefact s’anime de l’intérieur. Qu’un trait trouve sa justesse, qu’une forme nous semble aussi vraie et indispensable que la vie elle-même. Et pour cela il faut cracher beaucoup de faussetés sur le papier, de lourdeurs, de tics graphiques. Chaque dessin cherche son point d’équilibre et avec l’habitude, le dessinateur apprend à reconnaître cet instant de grâce où le dessin lui-même déclare qu’il a atteint sa plénitude. Ce que je dis là peut paraître un peu ridicule ou mystique mais tout dessinateur ressent, je pense, ce que j’essaie de dire. C’est l’instant où la main repose le crayon, ressentant presque physiquement qu’il n’y a plus rien à ajouter.

 

Dessiner c’est développer ce sixième sens, graphique, qui est l’intelligence du trait, une pensée en action ou un acte réflexif. Comme si on tendait face à soi la page tel un miroir et qu’on tatonne jusqu’à que le reflet qu’elle nous renvoie soit le bon. C’est un anti Narcisse qui se complaît dans le reflet de son apparence : ici il s’agit de polir, corriger, fouiller dans la forme pour y trouver l’image que l’on a comme en négatif, en tête. Une image aveugle, fantôme, qui ne prend vie que plaquée sur une surface. Et qui doit beaucoup à tous les ratés, les essais jetés à la poubelle. Ce qui n’est pas toujours agréable mais qui est si jubilatoire quand la magie opère.

 

Apprendre à dessiner c’est apprendre à oter les obstacles, un à un, qui nous empêche de bien voir, de voir juste et vrai, de voir la vie elle-même se dessiner.

 

« C'est comme si la réalité était continuellement derrière les rideaux qu'on arrache... Il y en a encore une autre... toujours une autre. »

Alberto Giacometti

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22 octobre 2011 6 22 /10 /octobre /2011 19:56

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Un petit morceau d'une image en cours. En attendant la suite.

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11 octobre 2011 2 11 /10 /octobre /2011 15:41

pour un souci de lisibilité et de continuité je remet le début du texte "la question du sens" que j'avais déjà posté. Je pense avoir pointé tout ce qui pourrait faire sens , si j'oublie des aspects merci de me le dire! Bonne lecture...

 

 

 

La question du sens

 

Comme j'ai essayé de l'expliquer à travers la notion du fond et de la forme, un dessin est autant fait de ce qu'on y voit que de ce qu'on n'y voit pas. On essaiera donc de prendre conscience qu'un dessin n'est pas qu'une image, une enveloppe (si belle soit-elle). Il cache aussi un noyau invisible, en tous les cas subtil (et qui quelque part agit de façon subliminale dans la perception globale de l'ensemble). En effet, on ne perçoit jamais qu'une simple image mais aussi toutes celles qui l'accompagnent, toutes les sensations qu'elle provoque sur notre esprit (par connotation, culture, système de codes et de signes, sémantique). Que ces échos soient voulus ou pas par son auteur, tout dessin est « ouvert » (au sens où Umberto Eco parle d'oeuvre ouverte). Ouvert sur des interprétations multiples qui sont le fait à la fois du dessinateur et du spectateur ("C'est le spectateur qui fait le tableau" disait Marcel Duchamp). 

 

Donc l’orientation (sens) peut-être le produit des deux, parfois avec domination de l’un ou de l’autre, parfois avec équilibre. Mais dire que le spectateur a sa part de création dans sa lecture  ne veut pas dire que l’auteur doit faire n’importe quoi.

Le premier spectateur d’un dessin c’est le dessinateur lui-même, qui assiste à son apparition sur le papier. C’est donc aussi le premier spectateur. Et il ne peut pas faire autrement que chercher un sens à ce qu’il fait ou à ce qu’il essaie de dire. Avec des moyens différents de la littérature, un dessinateur exprime aussi un message, même si celui-ci n’est pas articulé avec des mots, il veut dire ou faire sens (quand bien même il cultive une volonté de ne pas dire, de ne pas illustrer une pensée, ce souhait même est une pensée et une volonté qui a des répercussions sur la forme).

Chez certains, il y a même un plan esthétique global, avec un programme et des thématiques bien précises(ce qu’on peut observer souvent dans la pratique de l’art contemporain ou chez certains écrivains), chez d’autres l’approche est plus intuitive ou empirique. Quoi qu’il en soit, il y a une recherche de cohérence et d’unité dans le travail de tout dessinateur, donc de sens. Il faut apprendre à faire sens, connaître le sens des formes, se jouer du sens, du sous-entendu. On ne part pas de rien. Et tout peut faire sens, rien n’est à mépriser. Comme l’a dit Baudelaire de l’artiste-alchimiste : « il pétrit de la boue et en fit de l’or ».

Quels sont donc les paramètres de choix et de sens à la portée du dessinateur?

 

- Sens du choix du support :

 

C’est la base est c’est un facteur important dans la réception finale d’un dessin. Est-ce que j’utilise un post-it, du papier machine A4, un bout de papier froissé ou du carton trouvé dans une poubelle, un fragment de document (qui par sa nature même communique déjà du sens, connote quelque chose)?

Cela englobe des questions de qualité et de quantité : support brut ou sophistiqué, précieux ou dit « pauvre », classiques ou pas (dessiner sur du papier ou sur un mur, sur un corps). Support de tailles petites, moyennes ou grandes. Dessiner sur un timbre poste n’a pas le même sens ni le même impact que de dessiner sur un support immense (de même que de chuchoter quelque chose à l’oreille de quelqu’un ou d’utiliser un mégaphone). Il faut donc peu à peu trouver le support le plus adapté en fonction d’une intention pour éviter les contradictions ou parasitages . Et de façon plus pragmatique, choisir un support qui supporte la technique utilisée (papier assez épais pour utiliser de l’aquarelle par exemple, à moins qu’il n’y ait un parti-pris de fragilité ou de négligence).

 

 

- Sens du choix des outils :

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Au début, l’apprenti dessinateur n’est pas toujours très conscient du choix du support et des outils adéquats par manque d’habitude. On voit ainsi des dessins fait au bic bleu sur du papier quadrillé qui connote un côté scolaire (qui dans un autre contexte, en choix assumé pourrait avoir son intérêt). Ou encore l’utilisation d’encre à paillettes (côté décoratif et kitsch, ou bien naïf).

Il faut commencer par se familiariser avec toutes les techniques, tous les outils dits « classiques » pour ne pas les ignorer ou ne faire que par défaut. Sinon c’est un peu comme si un pianiste n’utilisait que 5 touches de son piano. J’ai vu certaines personnes se cantonner à un ou deux outils (feutres, critériums) ce qui restreind énormément leur champ d’action et d’expression. Une fois qu’on a touché un peu à tout on peut s’amuser, détourner, utiliser les choses à contre-emploi, trouver d’autres possibilités. Mais de façon consciente.

Bref, l’étudiant doit prendre conscience peu à peu que le choix de l’outil a du sens.

J’utilise des outils agressifs, précis, qui grattent, blessent le papier pour dire telle chose. Et pour telle autre, plutôt la douceur d’un pinceau, le flou d’une technique à l’eau, etc. Pour exprimer un contraste ou une contradiction, je peux mélanger deux techniques et deux outils différents. Bref, il y a beaucoup de possibles et le plaisir du dessiner commence avec ces questions.

 

- Sens du choix des couleurs ou du noir et blanc :

 

Il ne s’agit pas là que de choix économique (je pense à l’impression possible d’un dessin, moins cher en noir et blanc qu’en quadrichromie) ou esthétique (le noir et blanc c’est triste, la couleur ça fait plus riche). Il y a des dessinateurs qui pensent leur art en noir et blanc, d’autres en couleurs, d’autres en bichromie, ou alternent entre noir et blanc et couleur. Ces deux domaines sont si vastes qu’on peut se spécialiser dans l’un ou l’autre sans pouvoir en épuiser les possibles.

Le noir et blanc a pour qualité une certaine sobriété, un degré d’abstraction face au réel, une gravité. Cela peut servir une intention, un projet, appuyer un thème particulier (notamment dramatique).

La couleur amène plus de complexité, plus de nuances, permet une expressivité des tons (et tous les codes qui lui sont associés).

On a coutume de dire que le noir et blanc est plus cérébral ou rationnel (on l’utilise dans le dessin technique, les plans comme expression d’une idée) quand la couleur serait plus sensuelle, émotionnelle (pour exprimer des sensations, de la passion). A vrai dire on peut dépasser ces définitions, tout dépend de la nature du dessinateur. Mais on peut aussi s’appuyer sur ce code culturel si besoin.

 

- Sens du geste :

 

Petits gestes, petites hachures ou amples coups de pinceaux, mouvement fluides. Ici, la question du format peut influer sur ce choix. Il est bon de diversifier les approches pour, encore une fois, ne pas se limiter. Par la suite, on apprend à se connaître et on voit vers quoi va notre préférence : de l’enluminure ou miniature au très grand format.

Le mouvement de la main sur le papier, dont l’outil conserve la trace comme un sismographe nous donne du sens : hésitation, assurance, fragilité, saccade, maladresse, angles aigues ou courbes et volutes. Il faut intégrer cela et l’adapter à son sujet, cela peut amplifier sa force.

On peut aussi parler là du sens au sens littéral : orientation, direction des traits. Comme en graphologie où on va interpréter tel ou tel psychologie en fonction de l’orientation du tracé des lettres (penchées en avant ou bien en arrière), la façon de tenir un outil, d’organiser la construction de ses traits, leur ordre d’apparition, tout ça amène une dynamique. Je n’ai pas d’autre exemple en tête que celui de Van Gogh et de ses tirets, flammèches qui animent ces peintures et dessins mais il est assez parlant.

Il faut penser à cela en dessinant : est-ce que j’imprime un mouvement vertical, horizontal, circulaire ? Et pourquoi ? Les choses ont du sens, autant en faire quelque chose. « Dieu est dans les détails » disait l’architecte Mies Van Der Rhoe.

L’expressionnisme a utilisé les déformations, l’outrance des couleurs et des formes jusqu’à la maladresse mais pas de façon gratuite. Cela appuyait un sentiment de dégoût et de malaise face à quoi on ne pouvait répondre par du « joli » (ce qui a été le but des Dadaïstes, jusqu’à en vouloir une mort du beau et de l’art). Les mouvements de la main, le rythme, l’énergie, cela a du sens.

 

- Sens du choix de la composition :

 

Je pense à certains dessins ou gravures de Giacometti qui intègre beaucoup de vide, joue avec la disparition des traits dans le blanc et à contrario aux all-over (qui signifie qu’un même motif s’étend jusqu’au limite du format) de Pollock ou Keith Haring qui saturent une surface.

Est-ce que j’opte pour une figure centrée et symétrique (classique) ou pour de l’asymétrie (plus dynamique) ? De quoi mon sujet a-t-il besoin ? Qu’est-ce qui va appuyer sa signification ?

Est-ce que je favorise le sens horizontal ou vertical en choisissant le sens de la page au format paysage (à l’italienne) ou au format portrait (à la Française) ?

L’endroit où je pose mes figures sur la feuille, comment je les pose, avec quelle technique, à quelle échelle… tout ça a de l’importance.

 

 

- Sens du choix des codes, citations, clins d’œil :

 

On peut ajouter du sens en détournant des images connues, ou s’appuyer sur des symboles, des signes pour mieux faire passer un message. On pourrait dire que c’est une façon d’exploiter du « déjà-là », se servir de ce que tout le monde connaît plutôt que d’inventer une symbolique obscure qui ne parlera qu’à soi. Ce travail-là n’est pas gratuit, il doit être la conséquence d’une intention, d’une vision globale, d’un propos. Il ne s’agit pas de remplir de références pour se donner du contenu, ou de jouer des effets visuels mais plutôt d’utiliser les meilleurs moyens pour parvenir à ses fins.

 

 

Sens du registre d’expression (comique, réaliste, fantastique, abstrait…)

Ce choix n’est pas anodin, il est parfois calé une bonne fois pour toutes chez certains : le registre est une façon de parler, sur un ton donné. On peut ainsi dire une même chose mais pas de la même manière. Comme un acteur par exemple, qui doit pouvoir être capable, à partir d’une même phrase, d’exprimer différents sentiments par son phrasé et l’intonation de sa voix. On peut croire que se restreindre à un seul registre peut être une limitation mais bien souvent la contrainte qu’elle induit offre des possibles dur à épuiser (je pense au cinéma muet par exemple ou encore à la bande dessinée muette). C’est bien souvent une question de caractère et de nature : en apprenant à se connaître graphiquement on trouve son registre, celui où l’on est à l’aise pour s’exprimer. On ne s’improvise pas comique ou grave, léger ou profond. Cela découle d’une façon d’être, de vivre aussi sans doute (je développerais plus tard cet aspect dans la partie  « sens de la vision »). Ainsi on pourrait dire que tout finit dans le dessin, y transpire : ce qu’on aime, ce qu’on déteste, ce qu’on boit, ce qu’on mange, avec qui on passe du temps.

 

Sens poïétique (working process / work in progress)

 

Poïésis veut dire « faire » en grec. La poïétique est l’étude du « faire ». L’art moderne et contemporain aura amené l’importance de cette notion : comment ça a été fait ? Par quels moyens ? A tel point que certaines œuvres sont plus à saisir et à apprécier dans leur démarche ou conception que dans leur résultat final isolé. Du moins on est invité à mettre en relation des façons de faire et la trace qui en est gardée.

Je pense à Pollock dansant au-dessus de sa toile ou à Yves Klein orchestrant ses femmes-pinceaux pour ses anthropométries. Richard Long dessinant une ligne au sol en piétinant l’herbe…

 

Working process : façon de faire, work in progress : travail en train de se faire. Tout cela a des répercussions sur le résultat. Nikki de Saint Phalle qui tire à la carabine sur ses peintures. Cai Guo-Quiang qui dessine avec de la poudre à canon qu’il enflamme. C’est aussi des nouvelles postures artistiques qui mettent en avant l’œuvre en train de se faire parfois au détriment d’un résultat « fini », d’un chef d’œuvre hypothétique : le brouillon, l’inachevé, l’intention brute ou le cycle sans fin devient une fin en soi. Et aussi la performance, l’acte lui-même pris dans une vision globale du travail (et qui par le passé était moins visible pour favoriser l’œuvre elle-même)

Ainsi le dessinateur peut ajouter au sens de ce qu’il fait et dessine, par comment il le fait et comment il le dessine : dans l’urgence ou avec beaucoup de temps, avec des moyens classiques ou pas, avec des techniques atypiques, des supports atypiques, dans de nouveaux contextes (je pense à la mode des concerts dessinés)…

 

Sens de la « vision » :

 

On parle souvent de la vision d’un artiste. Qu’est-ce que ça signifie précisément ? Je vais essayer d’éclaircir ce point car ça me semble être la colonne vertébrale de tous les autres aspects du dessin.

Le terme « Weltanschauung », propre à la philosophie, me semble adapté pour définir cette démarche (consciente ou pas) du dessinateur. Ce mot signifie la vision du monde ou conception des choses, un point de vue particulier sur la réalité. Car il n’y a pas de dessin sans dessinateur. Un dessin est comme le regard qui fait exister une réalité et qui peut aussi la mettre de côté. Comme des phares de voitures pouvant éclairer certaines zones, certains détails d’un paysage plongé dans la nuit. Si ça se retrouve sur le papier c’est qu’à-priori ça a un intérêt et ça doit être vu et vu sous l’angle imposé par l’auteur. Un bébé désigne du doigt les choses du monde qu’il découvre une à une, dessiner c’est aussi mettre en exergue, souligner, désigner, pointer. Et ce qui est dessiné, est dessiné d’un certain point de vue. Même si celui-ci n’est pas dit, il est induit dans chaque production et c’est lui qui assure une continuité entre chaque dessin. On pourrait aussi parler de subjectivité, de « signature », de la marque d’un auteur.

 

Pour faire simple, on pourrait dire que tous les aspects de sens et choix différents cités précédemment et tous les moyens afférents sont déterminés par cette vision qu’à l’auteur. Qu’elle soit sombre, joyeuse, comique ou tragique ou encore un mélange de tout ça, chaque dessin est un indice d’une pensée non verbalisée mais imagée.

Et comme le roman par exemple dans certains cas, le dessin (ou encore la bande dessinée) peut être un moyen de créer un système philosophique. Un moyen de penser le monde. Parce que le dessin est mental.

 

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8 octobre 2011 6 08 /10 /octobre /2011 11:51

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Je suis en train de plancher sur une fausse affiche de film : Ronnie Rocket de David Lynch, film jamais réalisé. Voici quelques images pour une expo prévue pour Janvier 2012, accompagnée d'un catalogue (projet initié par Nicolas Gazeau le cinéphage).

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23 septembre 2011 5 23 /09 /septembre /2011 22:29

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Maison de la presse à Saint Rémy...

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21 septembre 2011 3 21 /09 /septembre /2011 13:25

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Portrait de George Orwell au tampon pour la nouvelle revue Feuilleton (actualités, nouvelles, littérature). Le choix des mots "books" et "cigarettes" découle du texte d'Orwell "Books vs cigarettes". Disponible en librairie en ce moment. 

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